Docteur Pierre NAHON

Chirurgien
Chirurgie Plastique, Reconstructrice et Esthétique


LES GRANDES QUESTIONS > Les patients > La simple envie

La chirurgie esthétique peut etre une simple envie


La chirurgie esthétique peut être une simple envie d’amélioration

L’intervention de chirurgie esthétique : un choix difficile malgré tout

En minimisant au maximum les risques, en s’adressant aux meilleurs spécialistes, en étant parfaitement convaincu de la nécessité de l’acte, le passage à la chirurgie esthétique reste, pour la majorité des patients, un moment difficile.

Subir une intervention de chirurgie esthétique, c’est se présenter un beau matin dans un environnement chirurgical, subir une anesthésie et se faire opérer alors qu’on n’est pas malade. On choisit volontairement de le faire. Huit personnes sur dix, au dernier moment, se demandent ce qu’elles sont venues faire là ! C’est dire qu’il faut vraiment ressentir un besoin profond pour avoir le courage de se livrer ainsi aux mains d’un chirurgien.

On peut définir trois types de patients. Il y a ceux qui ont un vrai besoin de se faire opérer :ils ont peur de la chirurgie esthétique, mais prennent le risque parce que le malaise est trop fort, et qu’ils ne le supportent plus. On rencontre aussi ceux qui ne craignent pas de se faire opérer, car ils évacuent le risque en pensant que la chirurgie esthétique est une chirurgie légère, et qu’on peut en user comme d’un simple moyen de consommation. Enfin, ceux qui sont, à mon avis, le plus mal dans leur peau, n’ont pas peur, et usent de manière répétitive de la chirurgie esthétique. C’est comme une prolongation de la deuxième catégorie, sauf que la chirurgie ne règle jamais leur véritable problème.

La chirurgie esthétique : un problème d’identité

La majorité des patients de chirurgie esthétique souffrent évidemment de leurs défauts. Mais tous ne ressentent pas les choses de la même façon. On peut considérer néanmoins que la plus grande partie des clients de chirurgie esthétique pâtissent d’une discordance entre leur ressenti intérieur et l’image qu’ils renvoient. Leur enveloppe extérieure ne correspond pas à leur identité ressentie. Ces discordances font que tout naturellement, certains individus demandent à se faire opérer, pour renvoyer une image qui leur correspond réellement. Ce n’est que la réparation d’une injustice, estiment-ils. C’est assez frappant pour le vieillissement. La plupart feront ainsi une opération de type lifting car l’image qu’ils renvoient est celle, pensent-ils, d’une personne bien plus vieille que ce qu’ils vivent intimement. Une jeune femme désireuse de supprimer les poches qu’elle a sous les yeux tiendra le même raisonnement. Elle affiche un visage fatigué qui traduira, pour les autres, un caractère fêtard, avec tous les excès qu’on y associe inconsciemment. Pourtant, sa vie est tout à fait calme, ces poches n’étant qu’un héritage congénital d’un de ses parents. Quant à l’augmentation mammaire, opération fréquemment demandée, elle l’est certes pour un caractère esthétique, mais bien aussi pour l’acquisition de l’image de la féminité.

Au final, ce hiatus, présent pour toutes les interventions de chirurgie esthétique, est encore très probablement le motif principal de recours à la chirurgie. Au bout de cette démarche, nous trouvons le comble du trouble de l’identité, le transsexualisme, où le patient est convaincu d’être une femme, malheureusement incarnée dans un corps d’homme.

Le véritable syndrome du transsexualisme est un sentiment profond, inébranlable, d’appartenir au sexe opposé, malgré une conformation sans ambiguïté avec son sexe chromosomique, et se traduit notamment par le besoin intense et constant de changer de sexe et d’état civil. S’installe alors un conflit entre le sexe psychologique et le sexe physique. Dans tous les cas d’observation, le sexe psychologique domine le sexe physique. Le transsexuel développe ainsi une répulsion pour ses propres organes génitaux, dont il veut être débarrassé. Cette demande est même prioritaire sur la demande de reconstruction.

Une simple envie d'avoir de plus gros seinsMais depuis un certain temps, la motivation de la demande de chirurgie esthétique évolue. Certains patients souhaitent une transformation corporelle, mais affichent une simple demande esthétique. Ils ont un souci réel de l’esthétique, savent qu’existent différentes interventions pour venir à bout de la majorité des défauts physiques, et réfléchissent froidement à l’amélioration de leur image.
On voit ainsi des jeunes filles dotées de poitrines parfaitement convenables souhaiter, pour un problème esthétique pur, une augmentation mammaire. Elles pensent tout simplement qu’avoir des seins plus volumineux les rendra plus attractives. Il n’y a pas de souffrance réelle, pas de complexe, mais un simple désir froidement affiché d’avoir des seins plus gros.

En chirurgie esthétique, le dernier à prendre la décision d’opérer, donc la responsabilité, est toujours le chirurgien

Aujourd’hui, cette démarche semble faire partie de la liberté de disposer de son corps. Au nom de la liberté qui, certes, est une valeur extraordinaire, tout un chacun dispose effectivement de cette nouvelle opportunité de faire modifier son corps comme il l’entend. La souffrance n’est plus la raison nécessaire et suffisante pour légitimer la chirurgie esthétique.

Le problème se pose alors au chirurgien, car il est, en dernier recours, l’intervenant, et prend la responsabilité d’opérer. Mais cette décision à prendre est ressentie bien différemment d’un praticien à un autre, car elle se fait moins lourde dans un tel contexte. Doit-on pour cela toujours satisfaire cette demande de chirurgie esthétique, en considérant qu’elle est légitime et recevable ?